Les carburants verts pour l’aviation : un défi technologique et économique

Les carburants verts dans l'aviation

L’aviation est l’un des secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre, avec environ 2,5 % des émissions mondiales de CO2. Pour réduire son impact environnemental, l’industrie aéronautique mise sur les carburants durables pour l’aviation (CDA), des alternatives renouvelables au kérosène fossile. Mais quels sont les avantages et les inconvénients de ces carburants verts ? Quels sont les obstacles à leur développement et à leur déploiement ?

Qu’est-ce qu’un carburant durable pour l’aviation ?

Un carburant durable pour l’aviation (CDA) est un carburant renouvelable, non conventionnel, qui peut être utilisé dans les avions existants sans modification des moteurs. Il existe plusieurs types de CDA, selon la source et le procédé de production utilisés. On distingue notamment :

  • Les biocarburants, produits à partir de biomasse, c’est-à-dire de matière organique d’origine végétale ou animale. La biomasse peut être issue de cultures dédiées (comme le colza ou la canne à sucre), de déchets agricoles ou forestiers (comme la paille ou le bois), ou encore de déchets ménagers (comme les huiles alimentaires usagées).
  • Les carburants synthétiques, produits à partir d’électricité renouvelable, d’eau et de CO2. L’électricité permet de produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau, qui est ensuite combiné au CO2 pour former des hydrocarbures par un procédé appelé Fischer-Tropsch.

Les CDA doivent respecter des normes techniques et environnementales pour être considérés comme durables. Ils doivent notamment avoir une réduction significative des émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble de leur cycle de vie, par rapport au kérosène fossile, et ne pas avoir d’impact négatif sur la sécurité alimentaire ou la biodiversité.

Voici une vidéo relatant ces faits :

Quels sont les bénéfices des CDA ?

Les CDA présentent plusieurs avantages par rapport au kérosène fossile :

  • Ils permettent de réduire les émissions de CO2 du secteur aérien, qui s’est fixé comme objectif de réduire de 50 % ses émissions nettes d’ici 2050 par rapport à 2005. Selon l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA), les CDA peuvent réduire les émissions de gaz à effet de serre de 70 % à plus de 90 % sur leur cycle de vie.
  • Ils contribuent à la diversification des sources d’énergie et à la réduction de la dépendance au pétrole, qui est une ressource limitée et soumise à des fluctuations de prix.
  • Ils favorisent le développement d’une économie circulaire et d’une bioéconomie, en valorisant des ressources renouvelables et des déchets qui seraient autrement gaspillés.
  • Ils stimulent l’innovation et la compétitivité du secteur aéronautique, en encourageant la recherche et le développement de nouvelles technologies et filières.

Quels sont les défis liés aux CDA ?

Malgré leurs atouts, les CDA font face à plusieurs défis qui limitent leur développement et leur déploiement :

  • Le coût : les CDA sont actuellement plus chers que le kérosène fossile, en raison du coût des matières premières, des procédés de production et de la logistique. Selon Paul Mannes, directeur de Total Aviation, le prix d’un billet d’avion augmenterait de 5 $ par passager pour un vol utilisant 1 % de biocarburant, et de 50 $ pour un vol utilisant 10 %. Pour rendre les CDA compétitifs, il faudrait donc mettre en place des incitations financières, comme des subventions, des taxes ou des quotas.
  • La disponibilité : les CDA sont encore peu produits et distribués, en raison du manque d’infrastructures et de normes harmonisées. Selon l’Association internationale du transport aérien (IATA), les CDA ne représentent que 0,05 % de la consommation totale de carburant du secteur aérien. Pour augmenter la disponibilité des CDA, il faudrait donc investir dans des capacités de production et de distribution, et harmoniser les réglementations au niveau international.
  • La durabilité : les CDA doivent être produits de manière responsable, en respectant des critères de durabilité environnementale et sociale. Il faut notamment éviter que la production de CDA entraîne une concurrence avec la production alimentaire, une déforestation ou une perte de biodiversité. Pour garantir la durabilité des CDA, il faudrait donc mettre en place un système de certification robuste et transparent.

Quelles sont les perspectives pour les CDA ?

Les CDA sont considérés comme une solution clé pour réduire l’impact environnemental de l’aviation, en attendant l’émergence de technologies plus radicales, comme l’électrification ou l’hydrogène. Plusieurs initiatives ont été lancées pour soutenir le développement et le déploiement des CDA, tant au niveau national qu’international. Par exemple :

  • L’initiative ReFuelEU Aviation, proposée par la Commission européenne dans le cadre du pacte vert pour l’Europe, vise à augmenter la demande et l’offre de CDA dans l’Union européenne, en fixant des obligations aux fournisseurs de carburant et aux exploitants aériens.
  • L’initiative SAF+ Consortium, lancée par un groupe d’acteurs canadiens, vise à produire du carburant synthétique à partir du CO2 capté dans une usine de fertilisants à Montréal, en utilisant de l’électricité hydroélectrique.
  • L’initiative Norsk e-Fuel, portée par un consortium européen, vise à produire du carburant synthétique à partir d’électricité éolienne, d’eau et de CO2 capté dans l’air ambiant, dans une usine située en Norvège.

Ces initiatives montrent que les CDA sont une opportunité pour l’aviation de réduire son empreinte carbone, tout en créant de la valeur économique et sociale. Toutefois, pour que les CDA deviennent une réalité à grande échelle, il faudra surmonter les défis technologiques et économiques qui subsistent, et renforcer la coopération entre les acteurs du secteur.

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